D’un
avis général 2016 s’annonce être une année très difficile.
2016
sera l’année du redressement et de la sortie de la crise. Et ceci n’est
pas un vœu. Pour la première fois nous avons la possibilité de mettre
un terme au cercle vicieux de la récession dans lequel nous sommes
entrés en 2010. Tout d’abord, nous avons réussi à boucler une année
particulièrement difficile, année d’âpre négociation, avec zéro
récession, quand tout le monde l’estimait à 4%. Et ce n’est pas le
produit d’un miracle mais d’un travail très dur. Pour la première
fois, la Grèce occupe la première place des 28 états-membres pour l’absorption
des fonds du CRSN 2007-2013, grâce à l’effort intense d’assainissement
des programmes. En l’espace d’un seul trimestre nous avons réussi à
injecter dans l’économie réelle 5 milliards d’euros. Tandis qu’en
2016 nous allons injecter dans l’économie réelle, conjointement avec
des programmes structurels et des programmes des banques européennes de
développement (EIB, EBRD), au total 8 milliards d’euros. Dans le même
temps, le succès de la recapitalisation des banques et l’achèvement
attendu de la première évaluation vont permettre d’entamer la
discussion au sujet de la réduction nécessaire de la dette, qui, à son
tour, marquera le rétablissement de la confiance dans la dette sur les
marchés. Par conséquent, 2016 sera l’année où nous retrouverons la
croissance, nous en terminerons avec les contrôles de capitaux dans les
banques, nous réduirons la dette et nous retournerons sur les marchés.
En deux mots, cela sera l’année du comeback de la Grèce après 6
années de crise.
Oui
mais je voulais vous demander si réellement vous pensez que le
mémorandum signé est réalisable…
Une
condition pour la réussite est le retour de la croissance et le
redémarrage de l’économie. Avec un programme d’investissements
publics et européens qui injectera 8 milliards d’euros dans l’économie,
avec une saison touristique dont tous les indicateurs montrent qu’elle
dépassera toutes les précédentes et probablement atteindre les 18
milliards d’euros et avec le retour tant souhaité de la confiance des
marchés qui ouvrira la voie à des investissements privés, l’économie
aura de très importantes possibilités de redressement. D’ailleurs n’oublions
pas que l’accord a pour objectif un excédent en 2016 de seulement 0,5%
du PIB. Si nous n’avions pas réussi cela après une difficile
négociation, alors 2016 n’aurait pas été simplement difficile mais
catastrophique, puisque le gouvernement Samaras-Vénizélos avait convenu
d’un excédent primaire de 4,5% c'est-à-dire 7 milliards d’euros de
plus. S’il existe un accord qui n’était pas réalisable, parce qu’il
avait été conçu pour ne pas l’être, c’est celui signé par le
précédent gouvernement.
Votre
gouvernement a devant lui la réforme de l’assurance. Vous continuez à
vous engager qu’il n’y aura aucune baisse dans les retraites
principales. Comment convaincrez-vous les créanciers ?
Il
n’y a aucun doute que le système d’assurance a atteint ses limites et
se trouve au bord du gouffre. Les responsabilités sont connues et
concernent la gestion de l’assurance par les gouvernements d’après-guerre
mais surtout du PASOK et de la Nouvelle Démocratie non seulement durant
la période de la crise mais avant celle-ci. Je vous rappellerais les taux
zéro des réserves de liquidités de la Banque de Grèce quand l’inflation
s’élevait à 25%, la bulle boursière, les obligations structurées
ainsi que la catastrophe du PSI qui a coûté plus de 13 milliards d’euros
aux caisses d’assurances. La réforme, par conséquent, est nécessaire
de sorte à ce que le système soit viable. Une nouvelle fois nous sommes
là pour éteindre un feu que nous n’avons pas allumé. De 2010 à
aujourd’hui, d’ailleurs, il y a eu 11 coupes dans les retraites par la
Nouvelle Démocratie et le PASOK. L’engagement que nous avons pris avec
l’accord de juillet est la réduction de la dépense des retraites de 1%
du PIB en 2016. Nous avons déjà garanti sa réduction de 0,6% sans
baisse des retraites et il reste environ 0,4% c'est-à-dire environ 600
millions d’euros. Il n’y a, cependant, aucune obligation à ce que
nous trouvions cette somme par des baisses des retraites. Au contraire, l’accord
prévoit la possibilité de prise de mesures équivalentes, sur lesquelles
nous avons déjà travaillé. Les créanciers, donc, doivent savoir que
nous avons suivi à la lettre l’accord, sans que cela suggère que nous
nous plierons à des exigences injustes et déraisonnables.
Et
vos lignes rouges vis-à-vis des décisions pour les prêts
« rouges » ?
L’engagement
du gouvernement est que les prêts immobiliers qui relèvent de la
protection de la résidence principale ainsi que les prêts des
petites-moyennes entreprises seront protégés des intentions cyniques des
marchés. Pour les petits et moyens, nous livrerons bataille et nous les
protègerons. Nous n’avons pas la même anxiété, je l’avoue, pour
ceux qui prenaient durant des années des prêts à fonds perdus auprès
des banques et présentent de soit-disant bilans déficitaires tandis qu’ils
épurent leurs gains dans des sociétés offshores à l’étranger. Le
cadre régulateur, donc, sera sévère mais socialement juste.
Le
vote pour le système d’assurance constitue pour vous également un vote
de confiance du gouvernement ?
Le
gouvernement a obtenu au cours des trois derniers mois deux votes de
confiance. Un sur les déclarations programmées et un pour le Budget.
Néanmoins, le vote sur l’assurance constitue un vote de confiance aux
générations futures qui ont le droit à une protection sociale. C’est
pour cela que je crois que finalement le nombre de députés qui donneront
leur vote de confiance au futur dépassera largement les 153.
Vous
persévèrerez dans la nécessité d’une entente nationale pour ces
questions ? Et qu’allez-vous faire ? Vous inviterez par
exemple à des rencontres les chefs de partis politiques ou vous
examinerez l’éventualité d’une nouvelle rencontre avec le Président
de la République ?
De
notre côté nous avons fait ce qu’il était possible de faire pour
adopter une ligne rouge nationale pour la protection des retraites. Les
forces de l’opposition, cependant, ont décidé dans une logique à
courte vue de saper cet effort. Ce qui, cependant, nous intéresse en
premier lieu est d’avoir à nos côtés la société dans ce grand
effort. Ceci est notre principale priorité et c’est dans cette voie que
nous persévèrerons.
Est-ce
que votre gouvernement souhaite la participation du FMI ?
La
position claire du gouvernement est que quiconque est bienvenu du moment
où il respecte les efforts de la Grèce et les difficultés du peuple
grec. Quiconque, également, compte avec les particularités européennes
et a pour objectif un dénouement réussi et non une sape durable du
programme. Je crois que le Fonds va prendre tout cela en compte et prendra
ses décisions d’ici au mois de mars.
Quand
pensez-vous que l’évaluation va s’achever ?
Le
processus commencera immédiatement après le vote sur l’assurance et la
réglementation sur les prêts « rouges ». Notre but est que l’évaluation
soit achevée avant la fin février.
La
discussion sur la dette pourrait-elle tarder à commencer ? Quelles
seront les positions du gouvernement grec lors de la négociation ?
L’accord
est précis et doit être respecté. La discussion sur la dette s’ouvrira
avec la finalisation de la première évaluation. En ce qui concerne les
positions du gouvernement grec elles sont, elles aussi, claires. Nous
avons déjà réussi une restructuration avec le refinancement de juillet
qui prévoit une période plus longue de remboursement et des taux bas
jusqu’en 2019. Le deuxième palier est l’allégement du remboursement
annuel de la dette pour la période après 2022, de sorte à consolider le
traité de stabilité de longue durée et rendre la dette viable à long
terme.
Vous
avez parlé d’un programme national de croissance. Quand allez-vous l’annoncer
et quel sera son objectif ?
L’accord
prévoit que nous déposions le plan national complet pour la croissance
jusqu’à la fin mars 2016. Ceci correspond également à notre
calendrier. En ce qui concerne le contenu, nous élaborons un plan qui
vise à dynamiser la demande active, à renforcer le travail et à
tonifier la compétitivité, cependant sans réduire la part salariale
comme la logique néo-libérale le préconise et qui a échoué partout en
Europe. L’objectif est de mettre l’accent sur l’innovation, la
qualité et la valorisation des avantages concurrentiels de l’économie
grecque, comme l’est son personnel hautement qualifié, sa position
géostratégique, etc.
Quand
allez-vous déposer les propositions pour la révision
constitutionnelle ? Comprendront-elles une réduction du nombre des
députés ?
La
Constitution grecque a subi des blessures tant sur son contenu que sur son
application. Sa révision est nécessaire et impérative pour qu’elle
soit plus sobre, sage et bien entendu plus démocratique. C’est une
question de crédibilité du système politique. Il n’est pas
concevable, par exemple, que la classe politique ne soit pas soumise aux
mêmes mesures pénales que n’importe quel autre citoyen. Ceci doit
cesser. Notre but, cependant, est que le débat pour la Constitution se
déroule avec la plus large participation possible de la société,
des institutions, des citoyens, du Parlement. Nous déposerons nos
propositions après la première évaluation du printemps, de sorte à
pouvoir lui accorder toute l’attention nécessaire et toute l’importance
qui lui sont dues. Maintenant, en ce qui concerne le nombre de députés,
nous n’avons pas de tabous, nous aborderons tous les sujets, mais
croyez-moi je ne pense pas que cela soit le problème majeur du système
politique grec. Quand des questions de démocratie et de participation des
citoyens, de responsabilité des ministres, de protection des droits
individuels, il est bon que le débat ne dévie pas vers des sujets
stupides et incompréhensibles.
Votre
proposition pour la loi électorale comprend-elle la suppression ou la
baisse du bonus de 50 sièges ? Le seuil de 3% va-t-il rester ?
Notre
proposition pour la loi électorale constituera une section de la
révision constitutionnelle et visera à un système électoral plus
proportionnel et constant, qui sauvegardera dans le même temps la
possibilité de former un gouvernement avec une appartenance politique et
idéologique claire. Nous ne créerons pas un système électoral qui
favorisera les grandes coalitions et les formations inconvenantes.
À
quand estimez-vous la fin du contrôle des capitaux ?
J’ai
déjà exposé à multiples reprises le projet politique et l’agenda du
gouvernement, nous souhaitons terminer la première évaluation au cours
du premier trimestre 2016, par la suite la discussion sur la dette sera
lancée et au cours du deuxième trimestre 2016 nous serons déjà passé
à des rythmes positifs de croissance. Durant cette période, les
contrôles de capitaux seront progressivement allégés, de sorte à ce
que nous abordions le second semestre 2016 avec des rythmes de croissance
positifs et une totale liberté de transfert de capitaux.
Quelles
sont les lignes rouges du gouvernement concernant la formation d’un
Corps de Garde Frontières Européen ? Ne redoutez-vous pas une
légalisation de la « grisisation » de l’Égée ?
L’Égée
n’est pas gris pour que soit légalisée une quelconque grisisation. En
aucun cas les décisions européennes au sujet du Corps de Garde
Frontières Européen ne peuvent mener à des questions de
souveraineté en Égée. Les frontières de la Grèce sont les frontières
de l’Union et il n’y a aucune contestation possible à ce sujet.
Dernièrement,
pourtant, les flux de réfugiés sont en augmentation en provenance de
Turquie. Que va-t-il se passer si la Turquie ne respecte pas l’accord
avec l’UE puisqu’elle a déjà reçu les importantes
contreparties ?
La
crise des réfugiés n’est pas une question bilatérale. Il s’agit d’une
crise mondiale qui peut ébranler les fondations mêmes de l’Europe. C’est
pourquoi il est nécessaire que la logique de la solidarité, de l’humanisme
et de la protection pieuse des droits de l’homme doit prévaloir. Ceci,
cependant, ne veut pas dire que l’Europe ne doit pas faire tout ce qu’elle
peut pour convaincre la Turquie de respecter ses engagements. En même
temps, elle doit avoir le courage de commencer le processus de
relocalisation non seulement depuis les îles grecques mais aussi depuis
le littoral turc.
Envisagez-vous
d’aborder la question d’un assouplissement du programme en raison des
conséquences sur notre pays de la crise des réfugiés ?
La
question d’un assouplissement budgétaire en raison de la crise des
réfugiés a déjà été discutée au plus haut échelon européen, M.
Schultz compris. Je pense qu’une telle perspective est non seulement
souhaitable mais indispensable. Non seulement pour la Grèce, qui est sous
programme, mais pour tous les pays directement touchés par la crise des
réfugiés.
A
votre connaissance, l’étude des listes parvenues à Athènes peut-elle
mener à de l’argent politique ?
Notre
gouvernement ne reste pas les bras croisés face au problème de la fraude
fiscale qui très souvent dissimule aussi de la corruption. Le
gouvernement fait tout son possible pour aider la Justice à faire son
travail mais ne s’implique pas là où il n’a pas de compétence. Nous
faisons ce qu’il y a à faire pour que les informations parviennent à
la Justice et ensuite seuls les juges et les procureurs sont compétents
et responsables des évolutions. |